jeudi 13 septembre 2012

Actualité

Il flotte aujourd'hui comme un parfum d'Actualité. La formule peut sembler triviale et c'est la raison pour laquelle j'ai passé l'éponge sur son dernier élément : désormais, l'Actualité devrait trouver sa place entre Actium et Adam au dictionnaire des noms 'propres', du moins celui de l'Internaute.

Brève, selon la plupart des sites web des grands quotidiens 'indépendants' francophones de Belgique et de France, l'information du jour concerne...l'annonce...de la sortie...imminente...d'un produit de consommation.

Encore s'agirait-il d'un type de produit dont les usages modifieraient significativement et durablement nos vies à défaut d'en bousculer nos petites habitudes ou d'y créer de nouveaux besoins, sa mise AU jour aurait été justifiée, voire incontournable. Mais non. Il s'agit d'une mise À jour d'un appareil bien précis qui n'a d'exclusif que les noms, marques et logos dont il est affublé. Pour le reste et si l'on s'en tient à la stricte analyse de ses usages, ce nouvel objet n'apporte absolument rien d'inédit. De la même manière qu'un aspirateur aspire ou qu'une boussole indique le nord, ce téléphone intelligent téléphone intelligemment, comme tous les autres.

Quelle est donc la raison de cette couverture médiatique? La réponse est d'une limpidité terrifiante : cette Actualité rapporte. Le succès de cet objet-là - pour toutes les meilleures et les pires raisons du monde - est tel que la masse de gens acquis à son Actualité a dépassé le nombre de lecteurs potentiellement intéressés par n'importe quel autre sujet d'Actualité.

Qu'il s'agisse du refus d'un grand libraire de distribuer un pamphlet à la gloire du plus nocif assassin que l'Europe ait jamais porté depuis la deuxième guerre mondiale ; qu'il s'agisse d'une volonté de retour aux Etats-nations dans la bouche du Président de la Commission européenne ou qu'il s'agisse même de la grossesse de l'une des meilleures joueuses de tennis de tous les temps, aucun fait d'Actualité - et d'intérêt général pour deux des exemples cités - n'a pu retenir la fièvre consumériste qui sévit chez les amateurs - et les détracteurs (ce n'est pas une blague) - du téléphone pommé.

Et puisque le modèle économique de nos chers quotidiens - et de leurs corollaires respectifs en ligne - est principalement articulé autour des revenus publicitaires, la meilleure Actualité pour ces entreprises privées - mais subtilement subsidiées quand même, faut pas déconner - est celle qui concentrera la plus grande attention, le plus grand nombre de lecteurs et, le summum, le plus grand nombre de clics. Un système de financement qui nous ramène à cette réalité a(lli)tterrante : la presse écrite se dit en crise mais ne remet PRESQUE JAMAIS la qualité de ses contenus en question (en a-t-elle seulement les moyens ?). Pour elle, la seule véritable raison de son déclin, c'est le 'cruel' manque de soutien des annonceurs, étonnamment de plus en plus déçus par les chiffres d'audience... Quelle ironie quand on sait qu'Apple ne communique pratiquement pas dans la presse quotidienne.

Quant à moi, en attendant de voir l'Actualité retrouver sa lettre de noblesse parmi les autorisés du dictionnaire des noms propres, j'économise dès aujourd'hui pour m'offrir celui qui n'aura jamais droit à sa majuscule : mon iPhone...5.